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06 10 02- Les miracles libanais
Da Jacqueline Amidi
in www.effedieffe.com, 21-9-2006
www.effedieffe.com/interventizeta.php?id=1440&parametro=esteri

Qui sait si le slogan fanfaron «guerre de l’occident contre la barbarie» est déjà révolu? Qui sait si la «redéfinition géopolitique du Moyen-Orient» est encore au programme du jour? Qui sait si les usraéliens «drogués de guerre»[ ] et l’occident «judéomane»[ ] profitent de la trêve pour orchestrer une nouvelle guerre «globale» et se mobilisent pour un autre «round»?
Ce qui est certain c’est que la dernière guerre qu’a subie le Liban a changé la donne et brouillé les cartes.
Israël n’avait pas calculé une surprise: le facteur humain. Il croyait dominer la situation aérienne, navale et terrestre, mais ce fut «la faillite militaire israélienne la plus importante et éclatante», selon Ilan Pappe[ ].
Comme tous ceux qui jusqu’ici avaient organisé la chute du Liban, croyant en finir en peu de jours, ils ont été eus. Ils ont eu à faire à de farouches combattants de telle efficacité à causer l’échec de tous les plans de l’agresseur.
Suite aux déboires militaires de Tsahal, c’est l’équilibre même interne d’Israël qui est train de se briser: la crise s’installe clairement et ouvertement au sein du gouvernement et de l’État-major israéliens, qui se lancent sans réserve des critiques amères et scandaleuses.

C’est l’immense fiasco:
«Le lendemain de la guerre sera le Jour des Longs Couteaux. Chacun accusera chacun. Les hommes politiques s’accuseront les uns les autres. Les généraux s’accuseront les uns les autres, les hommes politiques accuseront les gé-néraux. Et, surtout, les généraux accuseront les hommes politiques. [...]
Les accusations réciproques sont tout à fait justes. Cette guerre est une suite d’échecs militaires - dans les airs, sur terre et sur mer. Ces échecs ont leurs racines dans la terrible arrogance dans laquelle nous avons été élevés et qui est devenue partie intégrante de notre caractère national. Cette arrogance est encore plus typique dans l’armée et elle atteint son summum dans les forces aériennes. Pendant des années, nous nous sommes dit que nous avions l’armée la meilleure, meilleure, meilleure du monde. Nous en avons convaincu non seulement nous-mêmes, mais aussi Bush et le monde entier. Après tout, nous avions remporté une extraordinaire victoire en six jours en 1967. Résultat, cette fois-ci, quand l’armée n’a pas remporté une énorme victoire en six jours, tout le monde est abasourdi. Pourquoi, que s’est-il passé?. [...]
Mais au-delà de l’arrogance et du mépris pour l’adversaire, il y a un problème militaire fondamental: il est tout simplement impossible de gagner contre une guérilla. [...] Dieu seul sait ce qui a donné aux généraux d’aujourd’hui la conviction injustifiée qu’ils gagneraient là où leurs prédécesseurs avaient si lamentablement échoué. Et surtout: même la meilleure armée du monde ne peut pas gagner une guerre qui n’a pas d’objectifs clairs. Karl von Clausewitz, le gourou de la science militaire, a déclaré que “la guerre n’est rien d’autre que la continuation de la politique par d’autres moyens”. Olmert et Peretz, deux parfaits dilettantes, ont transformé cette phrase en: “la guerre n’est rien d’autre que la continuation par d’autres moyens de l’absence de politique”. [...]
Mais Olmert et Peretz [...] Néophytes en matière de guerre, ils ne savaient pas [...] que dans la guerre l’imprévu doit être prévu, que rien n’est plus temporaire que la gloire militaire. Ils étaient enivrés par la popularité de la guerre, incités par une bande de journalistes serviles, égarés par leur propre gloire de chefs de guerre.
Olmert était stimulé par ses propres discours incroyablement pompiers, qu’il répétait devant ses courtisans. Peretz, paraît-il, se mettait devant une glace, et se voyait déjà prochain Premier ministre, Monsieur Sécurité, un second Ben Gourion. Et alors, comme deux idiots du village, au son des tambours et des trompettes, ils ont pris la tête de leur Marche de la Folie, tout droit vers un échec politique et militaire. Il est probable qu’ils le paieront après la guerre. [...] La conclusion qui s’impose est: chasser Olmert, envoyer Peretz faire ses bagages et virer Halutz.
Pour s’engager dans une nouvelle voie, la seule qui résoudra le problème, il faut des négociations et la paix avec les Palestiniens, les Libanais, les Syriens. Et avec Hamas et Hezbollah.
Parce que ce n’est qu’avec ses ennemis que l’on fait la paix»[ ].

La politique du type: «Ou tu es avec moi ou tu es extrémiste, intégriste, terroriste, fasciste, nazi et antisémite»(!), ou encore: «Moi je frappe, moi je tue, si tu n’obéis pas», eh bien cette politique vient de recevoir son premier coup de massue tant attendu, grâce à la défense totalement surprenante et fantastique des résistants du Hezbollah. Au Liban ils font figure des Sept samouraï qui ont su finalement défendre les “déshérités” des réguliers pillages et crimes des truands et criminels.
Sur le terrain, le Liban devait ponctuellement subir une invasion soit israélienne soit syrienne (toujours avec le feu vert étasunien), en sortir avec des dégâts de plus en plus insurmontables et beaucoup de morts. Et à peine à nouveau débout (ça ne rate jamais!), sans pitié, tour à tour, Israël ou Syrie se remettent au carnage et à la dévastation.
Comment alors peut-on ne pas avoir de sympathie et ne pas exprimer la reconnaissance aux résistants? Ils représentent un «rempart contre Israël»[ ]. Ils ont rendu justice et honneur à tous les libanais, toute communauté confondue. Et tous les soutiennent[ ].
Quelle armée hésiterait à avoir dans ses rangs de tels combattants? Même Israël les envierait et les convoiterait.

Mais il n’est pas encore venu le temps de crier haut la victoire.
Le Liban a deux voisins très avides et ripailleurs: Israël et Syrie, chacun veut son butin. À moins d’un changement prodigieux.

1. Qui sont les ennemis du Liban?

Ce tout petit pays, qui pas même une fois de son histoire n’a agressé aucun pays voisin, s’est toujours trouvé dans l’obligation de se défendre des attaques d’autrui. À chaque tranche d’histoire ses ennemis. Les ennemis du jour sont: Israël, États-Unis, Syrie et réfugiés palestiniens au Liban.
Nous arriverons plus tard aux traîtres.

A. Israël

«Si les israéliens ne veulent pas être accusés de nazis, ils doivent simplement cesser de se comporter en nazis»
(Norman Finkelstein)[ ].

Dès avant sa création en 1948, les fondateurs d’Israël avaient leurs projets pour un grand “Royaume d’Israël”, déjà dessinant le remodelage du Moyen-Orient. Pour eux, il fallait mettre la main sur les deux “sources de vie” principales du Moyen-Orient: le pétrole et l’eau.
D’où l’acharnement des sionistes à diviser, coûte que coûte, et démanteler tous les États de la région, afin de les affaiblir et s’accaparer de leurs matières premières si convoitées[ ].
Au Liban, nous n’avons pas de pétrole. Mais nous sommes riches en eau, notre “pétrole blanc”. On comprend alors pourquoi Israël ne laisse jamais en paix le sud du Liban, et pourquoi durant cette dernière guerre de juillet-août il insistait pour arriver au Litani. La guerre d’Israël contre le Liban a été et sera toujours la guerre de l’eau aussi.

Pour Israël, écrit Christian Chesnot[ ], il faut à tout prix redessiner les frontières de la terre du «Grand Israël»: «Dans un rapport datant de 1941, Ben Gourion revient sur l’importance des eaux du Liban-sud pour le futur État d’Israël: “Nous devons nous rappeler que pour parvenir à enraciner l’État juif, il faudra que les eaux du Jourdain et du Litani soient comprises à l’intérieur de nos frontières”[ ]. Pourtant, historiquement, le Litani a toujours été inclus dans les frontières internationalement reconnues de l’État libanais, ce qui en fait par là même une voie d’eau exclusivement libanaise. Mais les dirigeants israéliens n’ont jamais abandonné l’idée de pouvoir utiliser un jour à leur compte une partie des eaux du Litani et de ses affluents.
“Le Liban est une erreur historique et géographique”, aimait à rappeler Moshe Arens, ancien ministre de la défense israélien. Dès sa fondation, Israël a considéré le Liban et plus spécialement sa partie méridionale comme une de ses sphères naturelles d’influence sur laquelle il se réservait le droit d’intervenir militairement ou non. “Lors de la première guerre israélo-arabe, l’État juif ‘grignote’ de manière insignifiante son voisin du nord en s’emparant de quatre villages qu’il restitue avant de conclure l’accord d’armistice signé à Ras el Naqoura le 23 mars 1949, qui prévoyait la mise en place d’une commission mixte et de six postes d’observation en territoire libanais”[ ]. L’accord d’armistice entre les deux États fixe alors comme ligne de démarcation la frontière de 1920 entre le Liban et la Pa-lestine. Ce statu quo territorial fut toujours contesté plus ou moins ouvertement par l’État hébreu.
D’un point de vue stratégique, Israël considère le Liban comme le “maillon faible”du monde arabe, pour reprendre l’expression de Ben Gourion. Sa déstabilisation pourrait servir les intérêts de l’État hébreu qui, un temps, souhaita l’émergence de mini-États confessionnels au Proche-Orient. Moshe Dayan et Ben Gourion tentèrent dans cette optique de susciter un mouvement séparatiste maronite. Dans les années cinquante, les dirigeants israéliens imaginèrent ainsi la création d’un Liban chrétien qui lui serait inféodé, comme le rappelle dans son journal Moshe Sharett: “Selon lui [Moshe Dayan, chef d’état-major de Tsahal (ndlr)], il serait seulement nécessaire de trouver un officier, fût-ce un simple major. Nous pourrions gagner sa sympathie ou l’acheter pour l’inciter à se pro-clamer sauveur des maronites. Alors, l’armée israélienne entrerait au Liban, occuperait le territoire nécessaire et ins-tallerait un régime chrétien qui s’allierait à Israël. Les territoires au sud du Litani seraient totalement annexés par Israël et tout irait pour le mieux”[ ]».

«Le mouvement sioniste – écrit Gilles Munier[ ] – n’a jamais accepté le partage du Proche-Orient effectué par la Grande-Bretagne et la France au lendemain de la Première guerre mondiale. La déclaration Balfour de 1917 promettant la création d’un “foyer national pour le peuple juif” en Palestine, ne suffisait pas. Les dirigeants sionistes voulaient en dessiner la carte. Ils réclamaient les deux rives du Jourdain, sa source, et le Litani. Le 29 dé-cembre 1919, Haïm Weizmann – Président de l’Organisation sioniste mondiale – demanda à Lloyd George, Pre-mier ministre britannique, que le futur État “englobe la vallée du Litani sur une distance de près de 25 miles – soit environ 40 km – en amont du coude, ainsi que les flancs ouest et sud du Mont Hermon”. [...]
En 1940, Yossef Weitz, directeur du Fond national juif, écrivait: “Il faut expliquer à Roosevelt, et à tous les chefs d’États amis, que la terre d’Israël n’est pas trop petite si tous les Arabes s’en vont, et si les frontières sont un peu repoussées vers le nord, le long du Litani, et vers l’est, sur les hauteurs du Golan”[ ]. [...]
Les premières agressions du sud du Liban eurent lieu dès 1948. La Haganah – ancêtre de Tsahal – occupa plusieurs villages du Djebel Amel, massacrant une centaine d’habitants. De 1949 à 1964, on dénombra 140 agressions israéliennes dans cette région, plus de 3000 entre 1968 à 1974![ ].
Pour les politiciens israéliens – d’extrême droite ou travaillistes – la guerre israélo-arabe de 1948 ne sera ter-minée – au nord – qu’après la prise du Litani. Dans l’esprit de David Ben Gourion, les frontières du Grand Israël – Eretz Israël [Terre d’Israël] – étaient toutes provisoires. [...] Concernant le Liban, on lit dans son Jour-nal, à la date du 21 mai 1948: “La suprématie musulmane dans ce pays est artificielle, et peut aisément être ren-versée; un Etat chrétien doit être instauré dans ce pays. Sa frontière sud serait le fleuve Litani”».

Il est clair que tant qu’Israël n’aura pas instauré son “Ordre Nouveau” au Liban, ces projets de guerre se perpétreront jusqu’au détournement de notre eau, envahissant la terre libanaise avec une ou d’autres “Opération Litani”, nom qu’Israël avait donné à la grande invasion du Liban du 14 mars 1978.
Toutes les opérations d’Israël contre le Liban ont été vouées à l’échec. Comme par une «malédiction»[ ] ou un «maléfice»[ ], selon nos agresseurs superstitieux.
Il va de soi, pour défendre notre Liban agressé il y avait infiniment mieux et infiniment plus. Il y avait et il y a la prière et l’amour de tout notre peuple, le combat indomptable de nos frères chiites, la muraille de sang de toutes nos victimes innocentes, le secours céleste de nos morts, la garde redoutable de nos saints, et, plus haut, la protection souveraine de la Vierge et l’abri divin de la croix du Sauveur. C’étaient pour nous, les libanais agressés, les «bénédictions du ciel» et les «miracles libanais», depuis toujours.

Les fermes libanaises de Chebaa, occupées par Israël aujourd’hui, richissimes en eau, ne lui suffiraient pas. Il lui faut donc encore grignoter du Liban pour se désaltérer, ce voisin sans cesse assoiffé, d’eau et de sang.

À souligner aussi que cet acharnement à essayer de créer à tout prix ce prétendu État chrétien n’est absolument pas mû par je ne sais quel amour ou amitié envers les chrétiens libanais. Ces “chrétiens” leur auraient servi uniquement en tant qu’instrument de haine et de guerre, contre toutes les autres communautés et enfin contre les chrétiens mêmes, écrasés dans cette meule de guerre, de destructions et de sang.
Les “clients” chrétiens de ces desseins, Israël les a trouvés au Liban. Mais jusqu’à maintenant leur but n’a pas encore été atteint, malgré l’aide directe du Mossad sur le territoire libanais!
Il ne sera pas inopportun un jour de rappeler publiquement certains faits et certaines vérités amères sur les responsabilités et les responsables, anciens et actuels, vivants et morts («La mort n’est pas une excuse!», suggérait Léon Bloy) de nos gangrènes. Car encore aujourd’hui le Liban paye pour les silences qui ont duré si longtemps et qui continuent à nous engouffrer dans l’aveuglement et dans la détresse. Un peuple à qui on fait l’économie de la vérité, sera vite réduit à se faire l’économie de la confiance et de l’espoir.

Mais une autre guerre est voulue par Israël au détriment du Liban, à part la guerre de l’eau: le sabotage de l’économie libanaise. Le système économique prospère dont a toujours joui le Liban dans la région déplaît à Israël, autant qu’à la Syrie d’ailleurs: les deux profitent largement de chaque situation de guerre au Liban.
Le Liban, carrefour de trois continents et seuil des civilisations, des cultures et des marchés du Levant, bénéficiait toujours, malgré les guerres, d’une réussite économique sans rival. Et cela pour le climat de confiance qui attirait les investissements et l’afflux d’importants capitaux privés provenant de l’étranger. Le secteur bancaire montrait une solidité extraordinaire. Le Liban représentait donc, jusqu’à la veille de cette dernière agression israélienne, la première place financière et commerciale et le principal centre d’affaires pour l’ensemble des pays du Moyen-Orient, rôle dans lequel aucune des autres places régionales n’avait pu le substituer. C’est tout cela aussi, qu’Israël a voulu détruire.
Et pourtant le libanais est reconnu pour son rapide redressement. Israël ne pourra pas démolir aussi l’âme libanaise.


B. Les États-Unis

«L’Oncle Sam est en train de rédiger un scénario
pour un occident terrifiant de bons contre les méchants... jusqu’à la mort»
(Gideon Samet, Haaretz)

Aux États-Unis ce n’est pas Bush ou son Administration qui gouverne, mais les néoconservateurs, ou néocons, une bande d’experts et stratèges, appelés aussi «les faucons», qui conduisent tranquillement la politique étasunienne, dépoussiérant périodiquement, depuis une trentaine d’années, le vieux plan sioniste du remodelage du Moyen-Orient, en faveur d’Israël ça va de soi.
À titre d’exemple, voici un néocon: Elliott Abrams, juif, tenant des propos assez curieux concernant l’identité religieuse et nationale des juifs américains.
Abrams – écrit Tom Barry – soutient que «les Juifs ne devraient pas donner de rendez-vous amoureux ou aller à l’école primaire avec des non-juifs»[ ]. Selon Abrams «En dehors de la terre d’Israël, les Juifs qui croient en l’Alliance passée entre Dieu et Abraham, doivent sans aucun doute se tenir à l’écart de la nation dans la-quelle ils vivent. C’est la nature même de la judaïté de se tenir à l’écart – sauf en Israël – du reste de la population», et « il insiste sur le fait que les Juifs doivent être loyaux envers Israël parce qu’ils “sont dans une alliance entre Dieu, la terre d’Israël et son peuple. Leur engagement ne faiblira pas, même si le gouvernement israélien poursuit des politiques impopulaires»[ ].
Voilà donc un échantillon de cette caste de néocons, dont sont épris les Bush, Rice, Cheney et Rumsfeld. Des personnages appartenant à une idéologie de cette catégorie, prêchant sans pudeur l’instigation à la haine raciale, ces farouches xénophobes se sont donc octroyé le droit de mettre les mains sur le Moyen-Orient entier! Et Bush et son administration devaient embrasser les opinions des néocons dans le souci de porter aux pays moyen-orientaux la liberté et la “démocratie”, «[...] un Proche-Orient où Israël sera bien moins en sécurité et où les Etats-Unis seront encore plus haïs»[ ]? Car la paix par la force, la pax americana, est une grande illusion de Terminator à la Arnold Schwarzenegger (aujourd’hui gouverneur de la Californie et fan de la politique actuelle de l’administration Bush).

Qui sont les néoconservateurs? Des adeptes du gourou Léo Strauss.
Léo Strauss, «émigré juif allemand, est la source directe», écrit Emmanuel Ratier, «de la doctrine politique de la Maison Blanche. Diffusant un enseignement public, il sélectionnait surtout ses étudiants les plus ambitieux pour leur délivrer un enseignement secret, qu’il appelait “le Royaume secret”. Une méthode de gouvernement fondée sur la manipulation perpétuelle des masses. Ses disciples, les néoconservateurs sionistes, ont obtenu tous les pouvoirs avec George Bush». «Pourtant nul plus que lui n’a donné au néoonservatisme (qui n’a strictement rien à voir avec le conservatisme américain classique) ses traits particuliers: sentiment de la crise, [...] rejet du pluralisme, appréhension du nihilisme, [...] fondamentalisme religieux, rôle majeur d’Israël dans le concert des nations etc.». «Autrement dit, il n’existe aucune moralité, ni bien ni mal, et que l’histoire humaine est insignifiante face à l’univers. Et que, pour faire marcher l’humanité, il faut faire croire à l’existence d’un “père fouettard” cosmique»[ ].
Des idéologues néocons donc qui gèrent leur “croisade pour la démocratie” au Moyen-Orient et qui détiennent les directions de la politique étrangère des États-Unis pour un «Nouveau Moyen-Orient», dont le centre serait évidemment Israël (à propos, le Liban est déjà, depuis plus de soixante ans, une république authentiquement libre, ou “démocratique”: nous n’avions pas besoin d’une guerre pour nous le faire comprendre!).
Les appels harcelants de Bush pour la «révolution démocratique globale» et sa politique de «pouvoir par la force» sont d’inspiration exclusivement néoconservatrice.

Le journaliste allemand Jürgen Elsässer donne une belle définition de Bush: «On peut voir que Bush est l’otage de son entourage. Et, comme il n’est pas très intelligent, il n’est pas en mesure de prendre les décisions, et doit suivre les idées de son entourage». Et sur les néoconservateurs il ajoute: «Mais les néoconservateurs sont fous, ils veulent faire la Troisième Guerre mondiale contre tous les Arabes et tous les musulmans». «Oui, il y a un double gouvernement qui échappe au contrôle de Bush. Ce sont des néoconservateurs, comme Cheney, Rumsfeld, Wolfowitz, Perle, des gens liés au pétrole et aux industries militaires. Le chaos global est dans l’intérêt de l’industrie militaire: quand il y a le chaos dans le monde entier, on peut vendre des armes et le pétrole plus cher»[ ].
C’est uniquement l’agressivité de l’école néoconservatrice qui détermine ce qui se passe actuellement au Moyen-Orient, et ce sont eux, les néocons, qui font une pression violente sur le gouvernement américain afin que toute guerre engagée dans la région soit exclusivement en faveur d’Israël. Depuis trois décennies ils ont conquis la Maison Blanche et font des divers présidents qui s’y sont succédé leurs marionnettes de l’heure.
Israel Shahak, dans l’introduction qu’il avait signée le 13 juin 1982 au document d’Oded Yinon, avait prophétiquement observé: «On perçoit très clairement le lien étroit qui existe entre ce projet et la pensée néoconservatrice américaine, particulièrement dans les notes de l’auteur dans son propre article»[ ].
Paul Wolfowitz, juif américain, néocon ou “faucon” des plus agressifs, surnommé aussi le “prince des ténèbres”, précédemment sous secrétaire à la défense de l’administration Bush et actuellement dixième président de la Banque Mondiale, le plus acharné des fauteurs de guerres et du «choc des civilisations», poussait sans relâche pour une guerre totale des USA contre Irak, Iran, Syrie et Liban, «pratiquement identifiant ainsi l’intérêt national d’Israël avec celui des USA», dit Maurizio Blondet dans son livre Chi comanda in America? (Qui commande en Amérique?) se référant à cet égard au Village voice du 21 novembre 2001[ ].
Il est évident que les néocons ne sont pas seulement dangereux pour le destin du Moyen-Orient, dont le Liban, mais aussi pour le futur de l’occident, dont l’Europe, car une fois le déclic parti, une fois le mécanisme démentiel d’une guerre globale en marche, qui peut freiner l’appétit de ces cannibales, de ces «drogués de guerre» sans fin?
Il est urgent aujourd’hui de trouver une alternative à cette «diplomatie de gangsters».
«Il nous faut comprendre que de tels événements criminels n’arrivent pas par hasard aujourd’hui. Ils ont été planifiés. Des peuples sont aujourd’hui punis de manière exemplaire afin que les autres peuples soient avertis de ce qu’il en coûte de défier le nouvel ordre états-unien et pour que chacun choisisse son camp»[ ].

«On ne peut comprendre cette guerre d’agression contre le Liban, ni l’acharnement contre les palestiniens, en particulier à Gaza, en dehors du contexte de la guerre permanente et préventive intentée par les néoconservateurs de Washington au niveau mondial et faite sienne par Tel Aviv», dit Michel Warschawski[ ].
En réalité, ce sont les vieilles manigances et les projets malfaisants des vieux sionistes tels Jabotinsky que les néocons cherchent avec obstination à réaliser. «Conquérir la Maison Blanche pour sa propre cause a toujours été un des objectifs suprêmes du sionisme, objectif largement et brillamment atteint au cours des ans», assure l’écrivain et journaliste anglais David Hirst dans sa préface à la troisième édition de son livre «The gun and the olive branch»[ ].

Mais persister dans ce jeu pervers du «à qui mieux mieux réaliser les souhaits macabres» ne mettrait pas en danger l’existence même d’Israël et des États-Unis? Car trop jouer avec le feu finit par brûler! «Très probablement il y aura un moment où le même Israël se trouvera dans une situation de danger grave, peut-être fatale pour son existence même», observe David Hirst dans cette même préface.
Et il rappelle ce que Moshe Sharett écrivait de son ministre de la défense, Pinhas Lavon: qu’il «“prêchait constamment des actes de folie” ou “la furie aveugle” dans le cas où Israël aurait été irrité».
Il ajoute aussi: «Dans son livre “The fateful triangle”, Noam Chomsky affirme que la vraie cible de la bombe atomique israélienne sont les États-Unis. Qu’Israël ait cherché effectivement de faire pression de cette façon sur les États-Unis, les français aussi le présumaient quand, dans une collaboration gardée rigoureusement cachée aux américains, ils fournirent la première et indispensable assistance au projet israélien de devenir une puissance nucléaire. “Nous pensions”, dit Francis Perrin, haut commissaire de l’Agence pour l’énergie atomique française de l’époque, “que la bombe israélienne fût dirigée contre les américains, pas pour être lancée contre l’Amérique, mais pour leur dire: Si vous ne voulez pas nous aider dans une situation critique, nous vous obligerons à le faire, sinon nous aurons recours à notre bombe atomique”».
D’où l’affirmation de Martin van Creveld, professeur d’histoire militaire à l’Université hébraïque de Jérusalem: «Nous possédons des centaines de missiles à tête nucléaire, que nous pouvons lancer en toute direction». Affirmation que David Hirst nous rappelle également dans son volume.

Est-il possible d’avancer l’hypothèse que dans le futur ces deux États-voyoux Usa-Israël, aujourd’hui soudés dans l’identique entreprise de gangstérisme universel, voient un jour leurs intérêts réciproques diverger et entrer en conflit? Conflit sur les butins? Conflit sur leurs stratégies de macrocriminalité? Conflit pour l’hégémonie ultime?

Y a-t-il aujourd’hui conflit entre civilisation et fondamentalisme?
Oui. Conflit entre les principes immuables et universels de toute civilisation morale et juridique, d’une part, et, de l’autre, la barbarie des fondamentalistes usraéliens – jacobins, maçonniques et talmudiques – qui sèment, partout où ils espèrent dominer, haine et carnage.
Conflit entre les civilisations ancestrales qui ont fait l’histoire de l’humanité et le sectarisme ou le fanatisme des «chrétiens renés» («born again christians», dont Bush fait partie), des «chrétiens sionistes»(!), des sionistes et talmudistes, prédicateurs des «idéologies du militarisme et de l’occupation», expression utilisée ouvertement dans le document signé, le 22-8-2006, par les patriarches réunis à Jérusalem, dont le patriarche latin Michel Sabbah[ ].
Quand en 1989 nous avions appris au Liban que quelqu’un de l’administration américaine (le secrétaire d’État James Baker?) s’amusait à répéter que le Liban était «une erreur historique», en réponse à cette absurdité je concluais ainsi un de mes articles: «Il est malheureux de se rendre compte comment le “monde libre” est prisonnier de son aveuglement. [...] Ni âmes bien nées, ni nombre d’années, rien ne fait des États-Unis un pays de grandeur. [...] Car un peuple sans racine, sans histoire, est condamné à l’ignorance. [...] Mais peut-être craignent-ils encore la majestueuse entreprise de ces géants de la mer – les phéniciens – eux qui ne gardent de leur histoire que quelques péripéties et aventures du Far West et leurs guerres de sécession. [...] Comment ne peut-on être alarmé? Si le gouvernement des États-Unis ne se réveille pas de son avilissement, malheur à ces États qui ne seront plus Unis! [...] Il [Christophe Colomb] n’a pas pressenti [...] l’influence maléfique de quelques dirigeants américains sur les pays de civilisation»[ ].


C. La Syrie

«Nous allons non seulement continuer à soutenir le président Assad,
mais nous cherchons à assurer la continuité de son régime après lui»
James Baker, Secrétaire d’État américain, 1989[ ]

L’inimitié de la Syrie envers le Liban remonte au moins à la fin de la première guerre mondiale, quand, après la chute de l’empire ottoman, la France et l’Angleterre se partagèrent la tutelle des pays du Moyen-Orient que les turcs avaient perdus.
Le choix des pays sous mandat français tomba sur le Liban et la Syrie. Et le premier septembre 1920, le représentant de la France proclame officiellement la constitution du Grand Liban, avec Beyrouth pour capitale, délimitant ainsi les confins: au nord Nahr el Kebir, au sud les confins de la Palestine et à l’est le sommet de l’Anti-Liban. Légitimité historique évidente et indiscutable car, comme l’avaient affirmé des libanistes tel l’historien Jawad Boulos: «C’est à peu de choses près le territoire de l’antique Phénicie classique et celui de la principauté de Fakhreddine II»[ ].
Et c’est alors que la Syrie s’est fâchée et n’a jamais démordu de son idée: que la France doit payer pour cette erreur. Car pour la Syrie, le Liban est une erreur historique et géographique, comme l’avait déjà exprimé Moshe Arens (décidément, quelle obsession!). En d’autres termes le Liban ne devait pas exister en tant que pays souverain, mais faire partie de la Syrie (et pourquoi pas, en passant, faire partie aussi d’Israël, à partir du Litani par exemple).
Ainsi, la Syrie n’ayant jamais reconnu la souveraineté du Liban, n’a point voulu établir des rapports diplomatiques et ouvrir une ambassade. Elle est présente au Liban à travers:
– Son armée, suite à l’invasion du Liban en 1976, et son occupation officielle qui dura de 1990 à 2005, après un feu vert américain.
– Ses services de renseignements, appelés Moukhabarat, pour espionnage, assassinats et acte de terrorisme divers: la même présence et détermination des services de renseignements israéliens, le Mossad. D’ailleurs la FINUL devrait prendre garde de ces deux services de renseignements surtout, et qu’elle ne fasse pas semblant de ne pas le savoir: en 1983 Israël et la Syrie, à travers leurs respectifs services de renseignements, Mossad et Mokhabarat, ont tout fait pour dégager toute présence étrangère de la scène libanaise afin d’avoir mains libres, d’éliminer des témoins gênants et de persévérer dans l’affaiblissement du Liban à travers les habituels accrochages, actes de terrorisme, tortures, attentats; sous couverture de “guerre civile” bien sûr. D’où les attentats contre les paras et les marines, dont mystérieusement on ne connaît pas encore définitivement les mandants. D’ailleurs ce ne seront pas seulement ces attentats dont on ne devrait jamais connaître l’auteur. C’est toujours ainsi, avec les services de renseignements de quelque pays-racaille.

Le père du rêve de l’annexion du Liban à la Syrie est Hafez Assad, déjà du temps où il n’était encore que ministre de la défense, mais second homme fort de la Syrie. Le même rêve a persisté quand il en est devenu le président, le “Lion” comme on l’appelait.
Par quel moyen annexer le Liban à la Syrie?
En armant les palestiniens au Liban, dans le but de le déstabiliser, le fragiliser et le réduire en proie facile afin de satisfaire son avidité et ses projets hégémoniques sur le Liban.
La Syrie, comme Israël, n’a jamais vu son rêve se réaliser, malgré les terribles bombardements, surtout ceux de juillet 1978 et août 1989. Jusqu’à l’invasion du 13 octobre 1990.
Le Liban a payé trop cher sous le joug syrien: destructions, massacres, arrestations injustifiées, et enlèvements et disparitions de personnes dont on ne sait toujours rien aujourd’hui.
Mais la Syrie est-elle vraiment et définitivement sortie du Liban?
De tout temps la Syrie a usé de tous ses stratagèmes pour rester enracinée dans la politique libanaise, sinon rester présente physiquement grâce à ses services de renseignements. Elle sera toujours prête, à n’importe quel moment et à n’importe quel prix, à jouer le rôle de “tuteur” sur le Liban, afin d’y faire régner la “stabilité”, à peine le feu vert américain lui sera donné, comme en 1990. D’ailleurs, durant la dernière agression israélienne de juillet-août contre le Liban, Assad fils ne s’est-il pas proposé d’“aider” Bush et Olmert à dénicher le «réseau d’Al-Qaida au Liban»?! Personne de ces maîtres de l’heure ne lui avait prêté attention, car ils savent bien, eux, qu’aucun réseau d’Al-Qaida ne se trouve au Liban, et puis la “carte” Bin Laden et Al-Qaida c’est eux qui la sortent au moment opportun. Pas d’usurpateurs, s’il vous plaît.
Les Moukhabarat syriens seront chassés définitivement du Liban quand enfin y gouvernera le vrai homme politique anti-syrien, droit et intègre. Ce n’est pas du tout le cas à l’heure actuelle. Le gouvernement de la “majorité” existante, fabriquée “provisoirement” par la loi électorale syrienne de 2000, à laquelle cette fictive “majorité” tient plus qu’à sa vie, est trop liée au passé – toujours présent – de l’histoire contemporaine du Liban. Ces “majoritaires” souffrent cruellement, entre autres et de longue date, de démangeaison chronique de la corruption.


D. Les réfugiés palestiniens

«Les réfugiés palestiniens [...] restent au fond de nos préoccupations
comme à la racine de nos malheurs».
Fouad Ephrem Boustany[ ]

Tout d’abord, il serait temps de parler clair à propos de la situation des palestiniens.
En Israël leur cause est tout à fait juste, à appuyer et à défendre. Leur guerre est absolument légitime contre leurs ennemis qui occupent leur terre et les oppriment avec une barbarie inouïe. Ils ont droit à une existence digne et souveraine, droit pour eux aussi à la sécurité et à la paix (si chères à Israël!), droit à la restitution de leurs terres et de leurs biens et aux réparations pour tout ce dont ils ont si injustement souffert.
Au Liban les réfugiés palestiniens, qui y avaient été accueillis fraternellement et généreusement, depuis l’accord du Caire en 1969, se transformèrent en agresseurs armés, maints pays arabes offrant leur concours à l’agression.

L’accord du Caire donc, signé le 13 novembre 1969, a créé la première crise du Liban: l’existence d’un État étranger armé à l’intérieur de l’État libanais.
Dix-sept camps palestiniens disséminés à travers le Liban, exclusivement sous le contrôle souverain de l’OLP (Organisation pour la libération de la Palestine). Entière liberté de manoeuvre aux fedayin palestiniens ravitaillés en armes et munitions de tout genre à travers la Syrie. Le Arkoub au sud Liban livré comme base militaire pour des opérations contre Israël.
Cet accord du Caire est signé entre la mission libanaise (représentée par le général Émile Boustany, commandant en chef de l’armée à l’époque, au nom du président libanais d’alors, Charles Hélou, et avec le consentement des ministres et parlementaires libanais, à la seule exception du député Raymond Eddé); la mission palestinienne représentée par Yasser Arafat pour l’OLP; et leur hôte égyptien Abdel Nasser, à qui l’ouverture du front libanais contre Israël convenait, pour sa stratégie anti-israélienne suite à la défaite de la guerre des 6 jours en 1967. Aucun autre pays, ni la Syrie, ni la Jordanie, ni l’Égypte (qui pourtant ont des frontières avec Israël), où les palestiniens avaient aussi trouvé refuge, ne leur avait octroyé la liberté de manoeuvre dont ils jouiront au Liban. Pire encore, ces pays arabes avaient fermé leurs frontières à tout usage palestinien, contraignant le gouvernement libanais, sous pressions diplomatiques et chantages politiques internes, à agir de façon contraire à la leur, autrement dit: permettre aux palestiniens d’agir souverainement à travers la frontière libanaise afin de leur favoriser leur gain de cause.
C’est alors qu’au Liban, avant d’arriver aux hostilités contre l’armée libanaise en 1973, puis à la guerre ouverte en 1975, se succédèrent les «excès regrettables commis par des éléments incontrôlés» palestiniens; c’est-à-dire: tueries de plusieurs milliers de libanais, enlèvement de centaines de libanais dont on n’a plus eu aucune nouvelle (nos desaparecidos), règlements de comptes de divers régimes arabes sur le territoire libanais...
Hafez Assad, alors ministre de la défense et de l’aviation, fera de son mieux afin de renforcer en hommes et en armes les bandits palestiniens, pour atteindre son objectif de déstabilisation et de subversion.
Bien installés dans leurs camps autour des principales villes libanaises, les palestiniens ne tardèrent pas à oublier leur rêve de rentrer bientôt chez eux, réintégrer leur terre, sortir de leur condition de déracinement vécue dans la misère. Peut-être aussi à cause de la proximité géographique (?!), ils refusèrent catégoriquement leur intégration culturelle au Liban et leur camps servirent désormais de bases pour des opérations contre nous, leurs hôtes, plus que contre l’ennemi hébreu. Depuis 1970 dans le camp de Berj el Brajneh, banlieue sud de la capitale, on avait déjà monté des ateliers de fabrication de munitions; les bases d’entraînement de plusieurs milliers de militaires de l’organisation Fath (sans conter les autres organisations) étaient au nombre de douze. Et en 1973, les fedayin de plusieurs organisations palestiniennes atteignirent déjà le nombre de 19 200!
Ajoutez à toutes ces conditions désastreuses le déséquilibre démographique et économique créé au Liban.
Jean-Pierre Péroncel-Hugoz (écrivain et journaliste du quotidien Le Monde durant 35 ans, de 1969 à 2004, notamment comme correspondant permanent au Proche-Orient), dans sa préface au livre de Je ne suis plus Frère musulman. Confession d’un ancien terroriste, dira: «Une coalition surarmée, menée par les palestiniens de Yasser Arafat, [...] étrangers et équipés par l’Union Soviétique, la Syrie et d’autres États ayant intérêt à la disparition pure et simple de l’espace de relative liberté et tolérance [...] qu’était le Mont-Liban [...]. Une fois dans le feu extrêmement violent de cette fausse guerre civile, de ce bien réel conflit libano-palestinien», on comprend «ce qui se passait dans les rangs “islamo-progressistes” en train de détruire le Liban [...]. Horresco referens, musulmans et non-musulmans vivaient alors au Liban, dans cet insupportable Liban, sur un pied d’égalité!»[ ].
Dans ce livre donc l’auteur, relatant des événements politiques et historiques vécus par lui-même, décrit sa vie et son initiation parmi les Frères musulmans, l’armement de l’OLP et ses connivences avec des politiciens libanais, les méthodes utilisées par l’OLP pour créer une guerre civile au Liban, les modes d’organisation des ravages et des massacres contre des paisibles villages paysans libanais, les mutilations, les viols, les enlèvements, les moyens de torture utilisés. Dans la Préface de Péroncel-Hugoz et dans la note éditoriale introductive est précisé entre autres que l’utilisation du «viol comme arme politique» avait été confirmé par les comptes-rendus et les ordres de mission retrouvés dans les camps palestiniens du Liban-sud parmi les papiers que les chefs de l’OLP n’avaient pas eu le temps de détruire avant la chute de ces camps en 1982.
Georges Habache, chef du FPLP (Front populaire pour la libération de la Palestine), déclara un jour: «Nous sommes une organisation marxiste-léniniste qui ne considère pas la libération de la Palestine comme son objectif ultime. Nous avons créé des supports organiques entre Palestiniens et révolutionnaires du monde entier. Nous sommes les alliés du mouvement progressiste mondial»[ ].
Ainsi les camps palestiniens et la cause palestinienne serviront, plus tard, au recrutement de toute sorte de professionnels de la subversion, du meurtre, de la destruction, subordonnant à leurs propres buts machiavéliques la vie et la mort du Liban entier. Et tout annonce l’éruption imminente du volcan: l’accord du Caire fournit à Tel Aviv le prétexte (encore et toujours!) pour des opérations militaires et représailles israéliennes sur le territoire libanais.
Les chefs des diverses organisations palestiniennes, ayant dépassé toutes les bornes de la délinquance, montèrent les scénarios des futurs événements au Liban.
En début d’avril 1973, un groupe de commandos israéliens, dirigé par Ehud Barak (déguisé en femme!) exécuta trois principaux dirigeants palestiniens de l’organisation «Septembre noir», qui était une branche de l’organisation palestinienne Fath. «Septembre noir» avait assassiné auparavant, le 2 mars 1973, à Khartoum, l’ambassadeur des États-Unis, ainsi que son premier conseiller et le conseiller de l’ambassade de Belgique, et avait pris en otage les ambassadeurs saoudien et jordanien (sans oublier qu’auparavant encore, en 1972, «Septembre noir» était aussi responsable de l’assassinat des onze athlètes israéliens aux jeux olympiques de Munich).
Et en quoi le Liban pouvait-il être coupable ou impliqué?
Eh bien, l’opération israélienne ayant eu lieu sur le territoire libanais (Beyrouth, rue Verdun), Toufic Safadi, alors un responsable de l’OLP, déclare le 11 avril 1973 devant trois mille manifestants à Beyrouth: «Vu la carence de la défense libanaise, la Résistance palestinienne se trouve dans l’obligation de se défendre elle-même par tous les moyens dont elle peut disposer [...]»[ ]. La souveraineté du Liban donc, selon les palestiniens, aurait dû désormais être subordonnée à leur “souveraineté” d’étrangers!

Ainsi l’armée libanaise se trouvait fautive à leurs yeux et cette situation procurait l’alibi souhaité des palestiniens – étrangers et armés sur notre terre, forts de leur arrogance et de leur provocation – pour «se défendre» eux-mêmes.
Mais contre qui? Contre Israël? Non, contre le Liban!
Il y eut des distributions de tracts attaquant l’armée libanaise. L’atmosphère devenant progressivement tendue, l’explosion fut alors inévitable. On commença par de petits accrochages provoqués par les fedayin contre l’armée libanaise. Mais suite à l’arrestation à l’aéroport de Beyrouth, le 27 avril 1973, de trois palestiniens transportant des armes vers Nice, et à l’arrestation le 30 avril de quatre autres palestiniens portant des charges d’explosif à proximité de l’ambassade des États-Unis, les palestiniens kidnappent deux soldats de l’armée libanaise, dont la riposte arriva finalement le 2 mai. Les accrochages durèrent dix jours et finirent malheureusement en queue de poisson, car l’armée libanaise, qui gagnait alors contre les palestiniens, reçut l’ordre du président Sleiman Frangié, d’arrêter les combats. «On apprend aujourd’hui que les États-Unis font pression sur le Liban [...]. On comprend, en outre, que le gouvernement américain refuse la réponse du Liban, selon laquelle il ne pouvait imposer de plus fermes restrictions aux activités des fedayins»[ ].
Cet ordre présidentiel d’arrêter le combat représenta évidemment une lâcheté et une trahison.
La poursuite du juste combat de l’armée nous aurait épargné la guerre successive éclatée le 13 avril 1975.
Ces événements de 1973 furent donc pour les palestiniens un test et une préparation à la guerre en bonne et due forme de 1975. Guerre qui sera déclenchée par les palestiniens mêmes dans le quartier Aïn el-Remmaneh de Beyrouth. Guerre qui dura quinze ans car, grâce à l’agression palestinienne, les libanais ont eu droit aussi aux agressions syriennes, israéliennes et d’une certaine façon aussi iraniennes à travers leurs pasdarans venus pour «chasser les ennemis israéliens». Ainsi toutes les guerres du Moyen-Orient de l’époque avaient leur victime idéale, puisque le choix était tombé sur le Liban “faible”, comme disait Ben Gourion, qui leur a servi de cobaye. Toutes les querelles intestines de tous les régimes, arabes et israéliens confondus, vont se déchaîner au Liban, aux dépens exclusivement des libanais.
Les palestiniens réfugiés au Liban, et leurs chefs surtout, ont-ils commencé aujourd’hui à comprendre la gravité de leurs crimes contre le Liban et le suicide politique que ces crimes ont représenté au Liban pour leur cause? Et pourvu qu’ils ne soient plus tentés de s’y prêter à nouveau. Le Liban a bien mémorisé la “leçon palestinienne” et le devoir de la juste réponse libanaise.

Avant la résolution 1701 (que tant tiennent farouchement à faire respecter par les libanais, mais qu’Israël, depuis le 14 août, ne cesse de transgresser chaque jour, grignotant avec sa coutumière effronterie des parcelles de notre territoire, tuant et enlevant sur notre territoire des libanais, violant chaque jour l’espace aérien libanais, tout cela sous les yeux des casques bleus, de la FINUL et de tous les tartuffes du “monde libre”, Israël ayant d’ailleurs déjà ignoré, depuis son existence, autour de soixante-dix résolutions de l’ONU et les conventions de Genève sur les crimes de guerre, sans jamais subir aucune sanction), il y a la résolution 1559, et pas encore entièrement respectée.
Cette résolution 1559 exige aussi le désarmement des palestiniens.
Et qui le demande aujourd’hui sur la scène politique libanaise, à part le général Aoun?
Ni les fictivement “majoritaires”, ni les hauts notables ecclésiastiques, ni curieusement ces diplomates étrangers qui parlent en réalité au nom de nos agresseurs et qui nous sermonnent sur la nécessité et l’urgence pour la FINUL de désarmer le Hezbollah, ce que la résolution 1701 ne prévoit nullement, confiant uniquement au gouvernement libanais la tâche d’étendre son autorité sur le territoire entier et désarmer en fin de compte le Hezbollah, quand et selon les modalités qu’il décidera souverainement.
Mais personne ne souffle mot sur le désarmement des palestiniens, étrangers et armés sur notre terre, et dont la résolution 1559 exige clairement le désarmement. Chose qui n’a jamais eu lieu.
Qu’attend-on? Veut-on garder les palestiniens armés en réserve, pour reprendre un jour la guerre qui favoriserait les desseins d’Israël, pour l’éclatement et le morcellement du Liban?


2. Par quel miracle y a-t-il encore
un pays nommé Liban?

Décrire ces quatre ennemis du Liban – Israël, États-Unis, Syrie et réfugiés palestiniens – était un devoir (pour qu’on ne dise plus que la guerre du Liban a été une «guerre civile»).
Ils sont tous les quatre extrêmement dangereux et encore décidés à nous faire payer cher, pour ne pas leur avoir permis la réalisation de leurs plans.
Toutes les fois qu’on envisage l’explication du calvaire libanais, la première réaction du commun des mortels est: «Cette terre si agitée! C’est très difficile d’y comprendre quelque chose!». Et pourtant imaginez David contre quatre Goliath.

Ajoutez aux palestiniens, aux syriens, aux américains et aux israéliens la caste lâche et basse de maints politiciens libanais, dans les coulisses du pouvoir ou au gouvernement depuis plus de trente ans, parfois de père en fils et en petits-fils, gangrenés par la corruption et la trahison: hier majordomes de la Syrie, aujourd’hui des États-Unis et d’Israël[ ], et demain, si la Syrie revenait tapageuse sur la scène libanaise (sur mandat usraélien, comme toujours!), ces mêmes majordomes ôteraient l’habit américain pour renfiler l’habit syrien tiré du coin de leurs armoires.
Ce sont eux qui ont permis de faire du Liban un terrain d’expérimentations et de manipulations subversives de toute perversité, objet de convoitises et de tentations criminelles des réfugiés palestiniens, des syriens, des israéliens et des américains (et même soviétiques, dans les années 70).
Ce sont eux qui ont signé la condamnation du Liban à la guerre de 1975, signant l’accord du Caire en 1969.
Ce sont eux qui encore aujourd’hui, esclaves de la politique usa-israélienne (ou usraélienne), osent garder leurs postes au gouvernement libanais, au lieu de démissionner, quand il a été clair au monde entier, et surtout aux libanais, que l’agression contre le Liban de juillet-août 2006 a été planifiée et voulue aux États-Unis et concordée, comme l’écrit Uri Avnery le 15 juillet dernier, avec des membres de l’officialité “majoritaire” libanaise[ ].

Le 23 août 2006 Uri Avnery nous prévenait encore: «Les commentateurs israéliens nous avaient donné l’illusion qu’une telle armée [libanaise] aurait été à la disposition des amis d’Israël et des États-Unis à Beyrouth, plus précisément Fouad Siniora, Saad Hariri et Walid Joumblatt»[ ]
Merci, Uri Avnery, de vos précisions, mais permettez-moi d’ajouter à votre liste les prélats, surtout maronites, qui continuent à jouer au Ponce Pilate.
«Mais de toutes les démissions, la plus navrante est la trahison des clercs», disait l’historien Fouad Ephrem Boustany[ ].
Les personnages changent (et encore, pas toujours!, puisqu’on trouve, dans la fictive “majorité” gouvernementale actuelle, des fils, même “spirituels”, et des petits-fils des pères de la condamnation du Liban au calvaire), mais leur politique est toujours la même. Cruellement immuable.
Enfin, la cerise sur le gâteau, ajoutez à tout cela l’arme et le puissant levier dont se servent les «princes de ce monde», les grandes puissances qui se disputent l’hégé-monie du “Nouvel Ordre Mondial”: la désinformation, c’est-à-dire le mensonge répandu avec soin, et inlassablement, pour aveugler et abrutir ceux qu’ils destinent à l’esclavage futur sous leur domination totalitaire.

Et nous voici aux miracles libanais!
Nous n’avons pas besoin de voir, nous, pour croire.
N’est-ce pas déjà tant de miracles, pour ce tout petit pays, le Liban, qu’il continue à exister, à résister et à se redresser malgré la puissance et l’acharnement de ses ennemis?
Pour des agressions bien moindres que celles vécues par le Liban, des pays ont été rayés de la carte géographique.
Trop d’ennemis en ont voulu à la vie du Liban. Et chaque fois, par miracle, les ténèbres ont été pourchassées.

Jacqueline Amidi
jacqueline.amidi@gmail.com


Ω

V.V

 
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