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28 07 2008 - KARS (TURQUIE) ENVOYÉ SPÉCIAL
Visite historique du président turc près de la frontière avec l'Arménie, fermée depuis 1993

KARS (TURQUIE) ENVOYÉ SPÉCIAL

"C'est donc là l'Arménie ? Si près ?" Surpris, le président de la République turque, Abdullah Gül, s'est arrêté un instant en surplomb du canyon au fond
duquel coule la rivière Araxe, la ligne naturelle qui sépare la Turquie de l'Arménie. Un regard de l'autre côté, d'où émergent quelques baraquements et
des miradors occupés par les soldats russes et arméniens qui gardent cette
frontière.

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De passage dans la région de Kars, mercredi 23 et jeudi 24 juillet, aux confins orientaux de la Turquie, M. Gül a marché une petite heure dans le site majestueux d'Ani : l'ancienne "cité aux 1 001 églises" est le vestige le plus important de la présence arménienne en Anatolie. Des églises, il n'en reste que cinq ou six, en ruine, disséminées dans les herbes folles. Les visiteurs peuvent venir les admirer depuis 2004. Auparavant, la zone, sous contrôle militaire, était totalement bouclée.

Ani, à la limite du territoire turc, fut la capitale du royaume bagratide d'Arménie, au Xe siècle. Le symbole de cette visite n'est donc pas passé
inaperçu, ni d'un côté ni de l'autre de la frontière, fermée depuis 1993 : Abdullah Gül est le premier président turc à s'y rendre.

L'Arménie et la Turquie ont rompu leurs relations il y a quinze ans, quand la guerre a éclaté au Nagorny Karabakh, une province d'Azerbaïdjan, peuplée en
majorité d'Arméniens, toujours occupée par Erevan. Dans ce conflit, la Turquie a pris fait et cause pour l'Azerbaïdjan, un pays de souche turque. Mais depuis
quelques semaines, de part et d'autre, les petits gestes d'ouverture se sont multipliés.

Début juillet, le président arménien, Serge Sarkissian, a invité son homologue turc à assister au match de football entre l'Arménie et la Turquie qui doit avoir lieu à Erevan, le 6 septembre, voquant "une nouvelle phase de dialogue
avec le gouvernement et le peuple de Turquie". M. Gül réserve sa réponse, suspendue aux troubles politiques qui agitent Ankara. Quelques jours plus tard,
on apprenait que des négociations ilatérales "secrètes" avaient eu lieu, le 8 juillet à Berne, en Suisse. D'autres rencontres sont prévues en août et septembre et, cette semaine, le ministre des Affaires étrangères, Ali Babacan, a participé à une réunion, aux Nations unies, en présence d'un ambassadeur arménien.


DIPLOMATIE DU FROMAGE


Les Etats-Unis mais aussi l'Iran, partenaire stratégique d'Erevan, soutiennent ardemment ce dialogue. Enfin, dernier geste en date, le gouvernement turc a démis de ses fonctions, mercredi, le directeur de l'institut turc d'histoire,
Yusuf Halaçoglu, connu pour sa rhétorique anti-arménienne et antigénocide. A Kars, la capitale de la province turque frontalière de l'Arménie, cela fait
bien longtemps que l'on veut rétablir des relations avec le voisin honni.
Coincée au fond d'un cul-de-sac, Kars est la première à souffrir de la situation. Ses rues défoncées et ses maisons russes du XIXe siècle décrépies trahissent une situation économique difficile.

Le maire (Parti de la justice et du développement, AKP) de la ville, Naif Alibeyoglu, avait rassemblé, en 2000, plus de 50 000 signatures pour la
réouverture de la frontière et se démène pour organiser des rencontres culturelles ou des foires commerciales qui réunissent des ressortissants de
tous les pays du Caucase. "Nous cherchons depuis des années à ramener la paix dans la région", dit-il. Ces positions lui attirent régulièrement les foudres
des nationalistes turcs et azéris. Une députée du parti au pouvoir à Bakou l'a traité, mercredi, de "provocateur" et "d'ami des Arméniens".

Mais en 2007, un salon des entrepreneurs, à Kars, a fait naître un projet transfrontalier. Des producteurs turcs, géorgiens et arméniens, ont lancé leur fromage "caucasien", fabriqué depuis février. "Nous voulons sauvegarder notre culture commune qui est caucasienne, explique Ilhan Koçulu, le promoteur du projet. La terre ne fait pas de discrimination. Je suis très peiné de voir ces
conflits dans notre région. Nous envoyons un message aux politiciens et aux populations locales : nous sommes tous des enfants de la terre du Caucase." La
diplomatie du fromage montrera peut-être la voie à suivre.

Guillaume Perrier
Article paru dans l'édition du 26.07.08.
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